Chronique d’une journée à la plage

De retour de vacances depuis plus d’une semaine, je suis donc dans cette phase terrible de la peau qui pèle et du choix de LA photo qui fera mon fond d’écran pendant plusieurs semaines afin de me rappeler que derrière cette tonne d’emails non répondus, il y a un horizon sablé.

Alors, plutôt que de me morfondre en rangeant mes tongs, j’ai voulu me replonger dans ces journées qui signifient été. Déjà, il faut savoir que j’adore la mer. Une vraie enfant ! Sans la mer (ou une grande étendue d’eau au moins), je n’ai pas l’impression d’être vraiment partie en vacances. Donc même si on avait opté cet été pour des aventures nordiques, il fallait qu’on y aille. Et j’ai pu me rendre compte que sur toutes les plages de France et des pays proches, on voit toujours les mêmes gens. Comme j’avais oublié mon livre (hérésie…), j’ai pu observer.

Apparemment, sur toutes les plages, tu as un sportif à la carrière trop vite arrêtée vers 12 ans et demi, qui a envie de transmettre sa passion à son fils. Et le pauvre n’y échappera pas. Badminton, raquettes, ballons en tout genre, il doit jouer. Si le petit Dylan ose dire qu’il préfèrerait glander sur sa serviette, tapoter les vagues ou même prendre un livre, il est déshérité direct. Et c’est parti pour une journée à entendre la mélodie du clac de la balle sur la raquette en bois entrecoupée de « oh mais t’aurais pu la rattraper celle-ci. Elles peuvent pas toutes être faciles mais c’est comme dans la vie, tout va pas te tomber tout cru dans l’bec, faut aller les chercher. » Dylan Senior, ce générateur de phrases parfaites pour ton LinkedIn à la rentrée.

Pas loin, tu as le bâtisseur. Lui, au départ, il fait semblant de jouer avec ses enfants à construire un château de sable mais ce qu’il préfère, c’est le moment où les mômes en ont marre et finissent par aller sautiller dans les vagues qui s’échouent en poussant des petits cris à chaque fois que l’eau approche de leurs orteils. Pendant ce temps, le baron Haussmann de la plage creuse des douves, met des ponts, construit des tours, des portes dans les murs d’enceinte, agrémente d’un ou deux coquillages… Ça fait une heure que ses enfants se sont endormis sur la serviette mais lui veut laisser sa trace, en oubliant que la marée viendra effacer tout son travail et ce, sans aucun scrupule. La marée, ou un autre enfant.

L’autre enfant, c’est celui des parents qui ont du mal avec l’organisation. Ils savaient qu’ils allaient à la plage mais le râteau et la pelle en plastique sont restés sagement dans l’entrée du gite. Ils ont bien pensé au maillot du petit et même au fond de crème solaire mais ont oublié qu’eux aussi pourraient profiter de la plage. Lui ira se baigner avec son caleçon, pariant sur le fait que personne ne verra les motifs Père Noël qui le trahissent. Elle, restera sur le plaid qui reste toujours dans le coffre de la voiture (la preuve qu’il est utile) en retirant son t-shirt mais en gardant le short (le dessous du dessous ne devait pas être aussi passe-partout que le dessous du dessus). Puisqu’ils sont de bons parents, ils laissent toute la crème solaire à leur chérubin qui ne comprendra pas pourquoi Papa est devenu tout rouge dans le dos. Ils repartiront avec leur enfant épuisé mais heureux, en essayant désespérément de marcher avec un caleçon salé collé aux cuisses sous le short.

En partant, ils lanceront un regard mi-envieux, mi-amusé à la famille Ingalls de la plage. Eux ont tout prévu – comme toute leur vie d’ailleurs. Ils sont arrivés tôt pour garder le meilleur emplacement. Celui qui est à l’abri du vent, cet emplacement qui se situe assez loin de la mer pour ne pas avoir à bouger même si c’est marée haute mais pas trop loin non plus pour que le sable soit assez humide pour ne pas voler, pour permettre des châteaux dignes de ce nom et pour planter le parasol de façon qu’il n’aille pas embrocher, au premier coup de vent, le petit Dylan, écroulé sur le sol, la bouche pleine de sable après une balle courbe de son père. Ils ont 4 enfants et semblent plus sereins que tous. La glacière est remplie de sandwiches que Madame a préparés la veille, pendant le bain des petits, de l’eau à température ambiante et même des Mister Freeze dans la poche plus froide.  Chacun peut étendre sa serviette sur la grande nasse en bambou qui a été installée préalablement, pour éviter le sable. Ils se mettent mutuellement de la crème solaire, telle une parodie des Dalton et aucun de leurs enfants n’envisage même de retirer son chapeau.

Et moi ? A bien y réfléchir, je suis certainement un mélange de tout ça. Alors, au lieu d’une photo pour mon fond d’écran quand, en février, je rêverai de partir, sur n’importe quelle plage, je repenserai à Dylan ou à la famille Ingalls. Mais aussi au cri des mouettes que tu entends au loin quand le sommeil t’emporte, au sable qui va se glisser jusque dans ton cuir chevelu, alors que tu n’as même pas fait de poirier, aux cerfs-volants qui jouent à cache-cache avec ton soleil, aux trois coquillages que j’ai ramassés presque par réflexe, à ce petit frémissement inévitable à la première vague qui atteint le nombril, à ce plaisir de sécher avec les rayons du soleil.

Et au caleçon aux motifs Père Noël.

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