Chronique pressée

« Non mais vous, les parisiens, vous êtes toujours pressés ! » Voilà ce qu’on m’a balancé il y a quelques jours quand je cherchais à me dépêtrer d’une personne un peu insistante. Et pourtant, à ce moment, je me sentais détendue, comme en vacances, j’avais des tongs et je me baladais le nez en l’air (meilleure façon de se ramasser en public). J’avais même déjà passé quelques minutes à être bien élevée et à écouter les avis que cette dame me donnait sur ma situation personnelle sans que je lui aie demandé.

Une fois que j’avais réussi à m’échapper (dans ma tête, j’étais déjà en mode El Chapo à élaborer mon évasion), j’ai repensé à ce qu’elle m’avait dit. Est-on vraiment si pressé ?

Oui.

Pas la peine de tergiverser, tout le monde le sait, on ne va pas se mentir. En revanche, la vraie question à se poser, c’est pourquoi ?

La vie parisienne (et je dis parisienne au sens large, ça vaut pour toutes les grandes villes) c’est un déferlement d’informations, de gens, de métros et de « deadlines ». Il faut courir après son métro parce que le rer est parti avec 10 minutes de retard, galoper sur des talons de 12 parce que tu es resté bloqué 30 minutes sous le tunnel de Saint Cloud sans raison apparente… Le trop plein de monde bloque la bonne circulation des fluides et met tout le monde en retard. (Vous remarquerez que je ne suis pas tombée dans l’écueil du « Hidalgo démission ») Et quand tu commences ta journée en retard, tu ne le rattrapes jamais vraiment donc tu cours. Toute la journée. Tu es pressé. Mais que se passerait-il si on calmait le jeu ?

Une femme que j’ai rencontrée récemment me disait que quand ses clients venaient la voir dans son labo au fin fond du sud-ouest, ils savaient qu’ils en avaient pour la journée et donc qu’ils profitaient vraiment du moment, sans regarder leur montre. Comme si on les envoyait dans un épisode de « Vis ma vie de hippie ». Et sur le moment, ils adorent, évidemment. Quand tu passes ta journée, ta semaine, ton année dans un marathon de rdv, tu es bien content qu’on t’offre un moment de répit. Mais en vrai, si tu y restes dans cette vie de gogol (faut dire ce qui est), c’est que tu aimes ça.

La preuve, c’est que quand tu es à l’étranger ou dans des endroits où les gens prennent plus le temps, ça te va bien 2 minutes, tu as l’impression que tu « respires enfin », que tu brises ce cycle infernal mais au bout de 2 jours (2 heures pour les moins patients) à contempler la pousse des pissenlits et le vol des coccinelles, tu ne rêves que de périph’ et de trottoirs surchargés. Alors que le moindre local t’enjoint à profiter et à regarder autour de toi, tu as juste envie de le secouer pour qu’il te lâche et te permette d’avancer à ton rythme, plus rapidement donc.

En vrai, je suis certaine que si on prenait plus le temps, on vivrait mieux, c’est certain. Enfin, à condition que la vie soit articulée comme ça aussi. Donc avec moins de dossiers à rendre, moins de rdv, moins de travail en fin de compte, ça serait jouable. Ou même en étant plus organisé peut-être. Ça me fait penser à ce bouquin que j’ai lu il y a quelques années et que je n’arrive pas à appliquer : La semaine de 4h. Le mec explique qu’en automatisant une grosse partie de son travail, en déléguant et en détournant un peu les codes, il arrive à faire sa semaine de travail en 4h. Et donc à prendre le temps pour touuuut le reste. Mais en vrai, qui peut se permettre de travailler 4h ?

Bref, évidemment qu’une partie de moi aimerait savoir prendre le temps. Ça a l’air si agréable de savoir flâner, de ne pas regarder sa montre (ou son portable), de savoir profiter sans culpabiliser. Mais en vrai, si je ne m’active pas au minimum toutes les 2h, je pense que je finis par mordre le premier qui passe afin qu’il y ait un peu d’action. J’avance vite, je marche vite, je travaille vite et je vis vite (pas simple à dire) parce que ça me va bien.

Et si toi ma petite dame aux conseils pas du tout avisés, tu as décidé que ce n’était pas la bonne façon de vivre, tu peux essayer de me le dire. Le temps que tu le formules, je serai déjà loin et je n’entendrai rien !

Quand tu as loupé le métro mais que tu refuses d’abandonner !

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