L’autre jour, j’ai suivi une formation sur la meilleure façon de prospecter via Linkedin et donc, inévitablement, sur la meilleure façon de se mettre assez bien en avant pour que le prospect aie autant envie de venir voir ton profil que le touriste relou a envie de poser sa serviette à 2 mètres de la tienne quand la plage est vide. Plein de bons conseils, c’est sûr, mais ça passe par cette phase étrange : il faut que tu apprennes à te mettre en avant. OK c’est ce que je fais tous les jours pour mes clients, mais bon, les cordonniers et leurs mauvaises chaussures, tout ça, tout ça.
Bref, aussi évident que ça paraisse pour le formateur, ça ne l’était pas pour moi. Et je me suis rendue compte que ça ne l’a jamais été. Finalement, je suis bien dans l’ombre, telle une petite fourmi acharnée. Il faut dire que je pars de loin : ma grand-mère n’aime pas aller au restaurant parce qu’on risque de la voir manger et déranger le serveur… (Je vous avais prévenus…)
En revanche, je déteste être transparente mais on en reparlera. (n’est-ce pas la serveuse qui m’a bien vu m’installer en terrasse, lui sourire et lui dire bonjour – mon côté provincial – et qui ne viendra que quand je suis sur le point de partir, après la 18ème hésitation…)
Déjà, depuis petite, je ne sais pas comment réagir aux compliments. J’admire secrètement ces gens (essentiellement parisiens, ne me demandez pas pourquoi, c’est juste un truc que j’ai remarqué) qui répondent un simple « oui, c’est vrai, hein ?! » quand on leur répond « Elle est canon ta robe, elle te va bien. » Non mais qui fait ça en vrai ? En le pensant sincèrement je veux dire ? Ça me donne l’impression que si tu n’avais pas abordé le sujet, ces gens-là penseraient que toi, tu es mal élevé…
Et ceux à qui tu fais un compliment un peu plus poussé qui finissent par en faire des tonnes sur leur réussite mais qui vont mettre 30 minutes (de monologue…) à se rendre compte qu’ils ne t’ont même pas demandé comment toi tu allais ? Eux, leur nombril est parfaitement aligné sur le centre du monde (d’ailleurs, c’est plutôt l’inverse, le centre du monde est aligné sur leur nombril).
Mais quand ce n’est pas le cas, comme pour la plupart des gens ? Comment se fait-il que le compliment soit si difficile à accepter ? C’est un truc gentil normalement. Et il peut même arriver sans que rien ne soit demandé en échange. Je le vois avec la plupart de mes copines. Des filles brillantes évidemment en plus d’être forcément drôles sinon, je ne les aurais pas remarquées. Si j’ai le malheur de le leur faire remarquer, elles vont forcément trouver une façon de se justifier, de m’expliquer qu’elles ont eu de la chance… blablabla…
Mais voyons les choses en face : je fais pareil. L’autre soir, une de ces fameuses copines m’envoie un message pour me dire qu’elle a adoré la dernière chronique : j’ai rougi devant mon téléphone ! (et je rougis de rougir devant mon téléphone, le « inception » de la timidité…) D’autant plus que cette fille géniale n’a pas instagram donc n’a pas le rappel régulier des posts. Elle y va de son plein gré ! Ou cette autre copine qui s’excuse parce qu’elle n’a pas encore eu le temps de lire la chronique de la semaine mais que c’est prévu. Alors que je devrais juste être contente et lui dire merci (ou l’engueuler enfin, tu as autre chose à faire le dimanche soir ??? tu préfères le film de Dany Boon sur TF1 ??? ), je lui réponds, le plus sincèrement du monde en plus, qu’elle n’est pas obligée, que ce n’est pas un devoir, et qu’il n’y aura pas d’interro surprise à notre prochain apéro. (en même temps, ce ne serait plus une interro surprise si je la prévenais. Fais attention à toi 😉 )
Se mettre en avant n’est pas naturel pour moi. Mais à côté de ça, une fois que tu commences, il y a ce genre de réactions qui fait plaisir, qui booste l’égo et qui fait que le paradoxe ambulant qui te sert de cerveau en arrive à ne pas savoir ce qui est le pire. Par exemple, alors que j’ai mis 2 ans à me lancer sur ce blog, la question qui revenait sans cesse était : Tu préfères que personne ne lise ce que tu publies ou que les gens lisent et qu’ils n’aiment pas ? (j’ai le spécialiste du « tu préfères » dans ma vie mais les siens sont plus drôles, je vous rassure.)
Bon, j’ai fini – manifestement ! – par trancher mais cette espèce d’égotrip qui consiste à se dire que les gens vont lire ce que tu écris est encore très peu naturelle pour moi. (et en vrai, je préfère que les gens lisent et qu’ils aiment !)
Malgré tout, ça ne m’empêche pas, régulièrement dans ma salle de bains, de m’imaginer répondre à des interviews parce que ma boite aura cartonné ou que mon blog sera tellement lu et « siiii original » que 3 maisons d’éditions auront voulu me publier. Comme quoi, même si ça n’est pas naturel, il y a toujours une petite partie de toi qui a envie de son fameux quart d’heure de gloire. Même si à 10 ans, je suis passée dans un article de la presse locale pour un camp de vacances écologique, donc mon tour est peut-être passé finalement !
Sur ce, je vous laisse, je dois aller me préparer pour passer à la télé.
PS : cet article plein de questions, aussi organisé que mon tiroir à chaussettes, n’est en aucun cas un appel aux compliments, comme ces gens qui te posent des questions juste pour que tu leur dises à quel point ils sont géniaux. SVP, ne faites pas ça et ne prenez pas ce post pour ce genre de requêtes. La petite part de moi qui adore les compliments sera ravie et rougira mais tout le reste de mon cerveau ne pourra s’empêcher de se demander si vous le faites parce que vous en aviez envie ou parce que je vous ai forcés à le faire. (ou ma mère … 😉 )
