Chronique garantie sans risque

Je suis la fille qui ne prend pas de risque. Ça m’a frappée la semaine dernière quand je me suis retrouvée à un rendez-vous professionnel avec un courtier en assurances qui a terminé par « Oui, très bien, je regarde ce que je peux faire pour votre plan d’épargne retraite ». Quoi ? Mais on parlait juste mutuelle pour les salariés au départ. Je sais que mes parents seront très fiers de moi en lisant ça mais quand même, 30 ans et quelques passés, et mon souci c’est d’épargner pour la retraite. « Au cas où ». (Sachant qu’il a calculé que je ne partirai pas à la retraite avant 2051, ça me laisse de la marge et pourtant…)

Ça s’est compliqué quand il m’a expliqué que je pouvais choisir comment placer cette épargne : soit en prenant des actions risquées mais à fort rendement soit avec des valeurs bien plus fiables mais aussi à rendement plus faible. Comment peux-tu imaginer, petit monsieur qui vend de l’angoisse en boîte, que les gens qui veulent prévoir leur retraite avant même d’avoir leur premier cheveu blanc, veuillent prendre le risque de tout perdre parce qu’ils ont pris des actions sur le « futur Bill Gates, quand son talent sera reconnu » ? Ça m’a rappelé mes cours de théorie des jeux à la fac. Et puis j’ai calculé le nombre d’années qui me sépare de cet amphithéâtre et ça m’a confortée dans le fait de signer.

Ce « Au cas où », j’ai l’impression que je pourrais me le faire tatouer en lettres gothiques. (Ce ne serait pas plus con que les « Carpe Diem » et autres « Only God can judge me ») Je me blinde de garanties et autres assurances pour qu’il ne m’arrive rien. Tu me dis qu’on part en voyage à l’autre bout du monde, je n’ai même pas encore le temps de savourer la surprise que mon téléphone est déjà en ligne avec Mondial Assistance pour l’option rapatriement sanitaire et problèmes juridiques. J’ai assez regardé Bridget Jones pour savoir qu’on n’est pas à l’abri d’un sac de coke glissé dans sa valise ! 

Et pas besoin de partir trop loin non plus. Je suis en voiture dans un coin où je sais qu’il est difficile de se garer ? Je saute sur la première place venue à partir de 800 m avant mon arrivée, sans même avoir pris le « risque » d’aller jusqu’au drapeau à damier noir et blanc de mon appli. De toutes façons, comme j’étais en avance, je peux largement finir à pieds. Et évidemment quand je finis par arriver à pieds là où je devais aller, il y a la place de garer un 33 tonnes juste devant la porte. Et je ne conduis même pas de camion…

Déjà petite, je ne prenais pas de risque. En vacances, alors que c’est le moment où jamais de se faire des copains et des copines, j’envoyais ma sœur en éclaireuse pour savoir si la fille avec son bras cassé à la balançoire était sympa. Quel risque j’aurais pris, sérieusement ? Surtout que plus de 20 ans après, cette fille est toujours une copine – même si elle n’a plus le bras cassé !

Quelle peur, quelle appréhension, quel cauchemar ont fait que je ne prenne pas de risque ? Aucune idée et honnêtement, je n’en suis pas traumatisée. Ce n’est pas une question d’éducation parce que ma sœur, elle, c’est une vraie casse-cou : elle parle aux gens à la balançoire et est prête à faire 3 fois le tour pour trouver une place pile devant le bar !

L’avantage de tout ça c’est la fierté qui émane de tout ton être quand tu oses enfin ! Que ce soit lancer ta boîte ou juste changer de couleur de cheveux, tu es contente. (Oui, la prise de risque peut s’avérer plus ou moins importante.) Plus forte que la drogue (j’ai pas essayé, trop risqué bien sûr – et puis, je vous rappelle que mes parents lisent !), cette sensation d’être une WonderWoman juste parce que tu oses publier les quelques lignes couchées sur ton cahier depuis des années sur la grande toile mondiale, faire ce qui n’était pas prévu, est forcément bien plus intense pour moi que pour les gens qui partent en week-end sans doliprane ni pansement.

Dernièrement, j’ai osé changer mes plans d’un vendredi soir par un autre plan complètement imprévu, avec des gens que je ne connaissais que très peu (sauf une, quand même. Pour l’inscription à Rendez-vous en Terre Inconnue, ça attendra). Et bim, ça s’est révélé être une des meilleures soirées que j’ai passées depuis longtemps. L’imprévu, la sortie un peu de sa zone de confort, la rencontre avec des gens dont je savais rien quelques heures avant (et peut-être aussi le Pic Saint Loup) ont fait que cette soirée devait être mentionnée dans cette chronique !  

Je n’ai pas l’impression d’être une trouillarde pour autant. Juste, je fais en sorte de contrôler tout ce que je peux contrôler pour être certaine que les imprévus qui vont arriver (et ils vont arriver !) seront gérables. Pessimiste diront certains, les autres, si vous êtes d’accord avec la phrase précédente, vous devriez travailler dans l’événementiel, c’est presqu’un mantra dans ce genre de boulot. Je crois juste – et ça, ça fait partie de mon éducation – que si tout est pensé quand tout va bien, ce sera plus facile à gérer s’il y a un problème qui finit par arriver.

Sur ce, je vous laisse, je suis en train de vérifier si je peux étendre la garantie sur mon assurance…

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