Désolée pour ce titre racoleur (d’aucuns diraient « putaclic ») je n’ai pas pu m’en empêcher. J’avais envie de parler de nuances et c’est malheureusement la première chose qui m’est venue. Bien que je n’ai ni lu le livre ni vu le film. Attention, je n’en fais pourtant ni une fierté, ni une revendication qui me placeraient du côté des « bien-pensants » et chevaliers des bons sentiments, des défendeurs de la grande littérature et seigneurs de la culture.
C’est d’ailleurs tout mon point de ce jour : la nuance. Depuis quelques temps, j’ai l’impression qu’on (et je m’inclus) a de plus en plus de mal à faire preuve de nuance. Comme quelqu’un qui verrait le monde à travers le filtre Inkwell, tout est soit noir soit blanc. Et là, je me place du côté de Christian Grey : je refuse.
Ça m’a notamment frappée avec la série Emily in Paris. Quand c’est sorti, j’ai fait, comme la plupart, un blocage parce que j’avais lu que c’était plein de clichés sur la vie parisienne, qu’il n’y avait qu’une Américaine pour voir la capitale comme ça, que c’était tellement sirupeux qu’on chopait du diabète juste en regardant le 1er épisode. Puis, mon amie, qui met de la magie dans ma vie, m’en a parlé en me disant qu’elle avait commencé et que oui, certes, un chamallow trempé dans du miel était moins sucré, mais que vu l’ambiance, ça faisait finalement un bien fou. Ça collait (pas sur les doigts) à ce que m’avait dit ma mère, j’étais toute seule chez moi cette semaine, il faisait froid et gris, c’était donc le bon moment pour me lancer.
Alors, oui, c’est gentillet, un peu niais, ça se passe dans un Paris qui me faisait rêver quand j’habitais encore face à un champ de moutons (oui, les moutons poussent dans des champs) mais c’est aussi tout le principe de la série. Et elle le dit très bien à un moment de controverse face à des Français : on regarde une série ou un film aussi pour se faire du bien, qu’importe si c’est vrai. Ce qu’on veut, avec ce genre de shows, c’est rêver, s’évader et sourire. Si je veux voir le Paris gris, maussade, et un peu terne, je n’ai qu’à prendre le métro.
Et encore, au risque de faire ma Valérie Pécresse, si on se dit que le manichéisme est à proscrire, on peut voir de jolis moments aussi dans le métro. Ce petit Papi aux yeux rieurs qui a refusé toutes les places qu’on lui laissait sous prétexte que « jamais je ne prendrai la place assise à une dame » alors que nous 5 qui nous sommes levées n’avions pas, en cumulé, son âge à lui seul, ou ces souvenirs de gens un peu festifs (c’était il y a longtemps) qui ont commencé à danser au rythme de la mélodie chantonnée par cette dame et qui ont fait la quête pour elle, lui rapportant plus en une chanson que toute sa soirée… Mais j’ai aussi assez pris le métro pour savoir que ces moments-là ne sont que très peu possibles quand il y a tellement de monde que si tu montes dans la rame, tu vivras la vie d’une sardine. Nuance…
Comme tout le monde (si on exclut ces super-héros qui arrivent à déconnecter), je passe pas mal de temps sur les réseaux sociaux, le paradis des binaires. Ils ont raison, les autres ont tort. L’un dit blanc, l’autre dit noir. (Christian Grey fait encore la gueule !) C’est peut-être mon côté bisounours, mais je me dis qu’il doit bien y avoir un monde ou ces deux esprits fermés réussissent à ouvrir une brèche qui leur permettrait de dire « ah ok, toi tu penses comme ça, je suis d’accord sur tel point mais pas sur celui-ci, explique-moi pourquoi tu penses ça, sans essayer de me convaincre pour autant ». Mais ça, oui, ce serait dans un monde idéal (ou dans Emily in Paris). Et les réseaux sociaux, en ces temps troublés, c’est loin d’être un monde idéal de débats, d’écoute et de respect de l’avis des autres.
J’avoue que je prends un plaisir malsain à lire les commentaires de posts qui, on le sait d’avance, vont amener leurs lots de complotistes et de pourfendeurs de la vérité. Généralement quand ces 2 blocs s’opposent, tu peux être sûr qu’il y aura encore plus de points de discorde que pendant la Guerre Froide. Je ne jugerai pas (ici en tout cas) les théories défendues par les complotistes mais force est de constater que celui qui s’y aventure mérite le titre de Bob Morane en chef. Et d’un autre côté, tu as ceux qui se sont fait un devoir d’expliquer à ces gens là à quel point leurs croyances sont débiles, et que par conséquent, eux le sont aussi. Mais de quel droit ? Si effectivement, il pouvait y avoir un débat, ce serait intéressant, mais on sait bien que les gens qui vont attaquer de front les complotistes le font par pure provocation.
Et je parle des complotistes versus les éclaireurs en chef, mais il y a tellement de débats, de sujets qui selon moi, manquent de nuances. La preuve : la prolifération des groupes « d’anti- » (les anti-quaires n’ont rien à voir là-dedans). Le débat ne peut pas avoir lieu avec des gens qui se collent eux-même une étiquette de bas du front (ça pose la question d’où on va poser l’étiquette d’ailleurs).
Et là, je vais faire l’inverse de ce que je prône depuis le début de cette chronique : une généralité. Quand ta seule objection à un débat d’idées c’est « non, c’est moi qui ai raison », tu es soit un enfant de 2 ans qui fait un caprice – mais les enfants de 2 ans ont rarement un avis sur les vaccins, les décisions gouvernementales ou le réchauffement climatique, les enfants de 2 ans ne sont finalement pas si impliqués dans le monde qui les entoure… – ou alors tu es une personne qui mériterait d’être réincarnée en poisson rouge. Eux n’ont que 2 choix : tourner dans le sens des aiguilles d’une montre ou dans l’autre.
Bref, comme dirait Gad, l’ex humoriste (oh ça va, on peut toujours faire des blagues), « je rêve d’un monde » où on pourrait tous se parler un peu plus facilement, un peu mieux, un peu plus respectueusement. Ça ne veut pas dire que je veux de la mièvrerie à tous les coins de rue, ça ne veut pas dire que je veux que des petits oiseaux chantonnant m’habillent chaque matin, ça ne veut pas dire que je défends le « politiquement correct », ça veut juste dire que j’aimerais qu’on arrête de devoir toujours choisir et toujours avoir un avis ferme et définitif. Ça vaut pour la politique, pour la cuisson de la viande, pour les choix de vie, ou pour l’héritage de Johnny.
Sur ce, je vous laisse, je vais aller commencer 50 nuances de Grey, il paraît qu’on va avoir le temps…
