Comme beaucoup de monde cette semaine (ou un peu avant pour ceux qui ont pris l’essai sur Salto exprès), j’ai regardé l’épisode « retrouvailles » de Friends. Oui, j’ai plus de 30 ans, oui, j’ai regardé la série en entier plusieurs fois, oui, je suis contente de tomber dessus lors d’une énième rediffusion sur la TNT. On se doutait bien que ça n’allait pas être la révélation de l’année mais j’avais quand même envie de regarder.
Et même si je ne vais pas partager mon avis sur l’épisode en lui-même (parce que globalement, on s’en fiche de mon avis… enfin, si vous lisez ça, peut-être pas tant que ça, finalement ) ; de revoir ces acteurs 25 ans plus tard m’a amenée à réfléchir sur le fait de s’assumer ou pas.
Ça n’a pas pu échapper à ceux qui ont regardé : il y a eu quelques changements physiques. Je ne vais pas juger la réussite ou non de leurs chirurgiens esthétiques (ce n’est pas mon métier mais je me note d’envoyer ce concept bien putassier à une chaine TV) mais plutôt la réaction qu’il y a eu autour de ça. Il suffisait d’aller sur les réseaux au moment de la diffusion pour voir l’acharnement de pas mal de monde sur le front immobile d’untel ou les pommettes tranchantes d’une autre. Et je me suis demandé comment il était possible qu’on en soit encore là quand partout on nous fait bouffer du « body-positive » et du « chacun son choix ».
Bien sûr, de les voir une génération plus tard, ça fait un choc. Ils ont vieilli, grossi mais nous aussi ! Alors, oui, il y a eu du bistouri mais comment veux-tu qu’il n’y en ait pas vu les réactions de tout le monde ? S’ils étaient apparus comme tes profs de lycée avec juste des rides et de l’embonpoint supplémentaire, est-ce que tu ne te serais pas dit « ben avec la thune qu’ils ont eue, ils auraient au moins pu faire quelques injections… » Ce sont les stars d’une série, d’une époque presque, donc inconsciemment, on a envie qu’ils restent tels quels. Et ça doit peser sur eux aussi. Je ne dis pas que leur vie est difficile, je dis juste que de toutes façons, il y aurait eu des remarques.
Et c’est bien ça tout mon point. Aujourd’hui, on te force presque à assumer ce que tu es. Il y a plein de mouvements, de comptes d’inspiration, de gens qui te poussent à être exactement comme tu es mais si ça rentre dans leurs critères. Essaie de dire à une bodypositive un peu vener que tu veux te mettre au régime pour être à l’aise dans ton maillot de bain cet été sur la plage et elle va te regarder comme si tu avais craché sur Simone de Beauvoir.
Bien sûr que ça serait presque la vie chez les bisounours, si tu acceptais exactement qui tu étais, sans donner d’importance à ce que pensent les autres mais parfois, ce n’est pas à cause de ce que pensent les autres que tu veux changer (ou ne pas changer dans le cas de nos chers Friends) mais parce que toi, tu te sens mieux avec ces 3 kilos de moins. Et même si les gens ne le voient pas, toi, tu le sais, tu remets ton jean fétiche tout en pouvant continuer à respirer. Donc forcément tu es plus beau. (les gens qui respirent sont généralement plus beaux, il faut l’admettre)
En fait, j’aimerais juste qu’on puisse assumer tout ce qu’on a envie d’assumer sans qu’on vienne nous expliquer que ce n’est pas la bonne façon de faire. Tu veux te laisser pousser les poils sous les bras et les teindre en bleu, go mais tu veux être imberbe des aisselles, ça ira aussi. Tu veux aller sur la plage dans ton maillot en taille 52, personne ne doit t’en empêcher, tu préfères sucer des feuilles de salade tout le mois de juin pour enfiler cette superbe combi à un mariage en début d’été, je suis pas sûre que ce soit bon pour ta santé mais après tout, si tu me laisses profiter de mon burger, fais bien ce que tu veux. (mais ne touche pas à mes frites, tu pourrais y laisser un doigt !)
Bien sûr, tout cela est facile à dire quand les choix que tu as à assumer ne sont pas vecteurs de discriminations. Globalement, mon poids, ma couleur de peau ou même mes cheveux ne m’ont jamais empêchée d’accéder à un entretien d’embauche ou de laisser un dossier pour un appartement. Et c’est là que tous ces mouvements qui montrent que les gens de la vraie vie sont utiles. Mais qu’on nous laisse décider de ce qu’on a envie d’assumer ou pas. Le côté obligation d’assumer ce bourrelet surnommé Jean Moulin tellement il résiste ou le début de moustache de ta tante Frénégonde me parait un peu contradictoire à l’essence même du truc.
Bref, on pourrait croire que j’ai écrit ce post juste pour défendre les acteurs de Friends mais rassurez-vous, ils m’ont juste servi à partir d’un point précis pour quelque chose qui me tarabustait (je rêvais de le placer) depuis longtemps. Dans ma tête, c’est un peu le monde de Oui-Oui (et j’aime bien le rouge & jaune) : je ne comprends pas qu’on emmerde qui que ce soit vis-à-vis de choses qui ne nous concernent pas. Qu’on laisse les gens faire ce qu’ils ont envie de faire que ce soit de la chirurgie ou au contraire, tout laisser aux mains de Dame Nature ! Tant qu’on ne me force pas à ne porter que des jupes longues parce que je fais plus que du 36… (remarque que j’ai entendue de la bouche de cette chère animatrice pas si « magnifaïk » et qui m’a donné envie de brûler ma tv.)
Sur ce, je vous laisse, mes frites sont arrivées et j’ai peur qu’on m’en pique.
