Chronique d’une décrépitude annoncée.

Passons sur le fait que j’attends mes 30 et quelques années, en 2020 pour lancer un blog (non, je n’ai pas eu de skyblog avant ça), je sens bien que je suis en train de glisser de l’autre côté. Que je peux essayer de résister à base de fredonnements sur du Aya Nakamura ou de conférence sur l’essor de TikTok, mais non, c’est inévitable, je glisse du côté des gens qui subissent les effets de la pleine lune sur leur sommeil.

Déjà, il y a un indice dans l’introduction : conférence sur l’essor de TikTok ! Ok, c’est un peu mon métier mais bon, si j’étais encore du côté des jeunes, je créerais mon compte et hop, « en avant la musique » (expression de vieux s’il en est…). Mais non, maintenant, je dois comprendre comment ça marche ces réseaux sociaux, parce que si je veux continuer à bien utiliser les technologies pour mes clients, je dois d’abord suivre une explication. Et là, j’ai une pensée émue pour ma propriétaire, le temps de ma dernière année d’études, qui voulait bien me passer son code wifi en échange de « cours d’internet ». Je m’en rapproche à grands pas …

Il y a d’autres signes qui ne trompent pas. Par exemple, les gens dont on parle dans les magazines people que je ne lis bien sûr que quand je vais chez le coiffeur (est-ce ma faute si j’y vais souvent ?), me sont pour la plupart étrangers. Et le pire, c’est que je n’ai même pas envie de chercher comment ils ont été connus, sur quelle émission des Anges ou des Marseillais ils se sont « illustrés ». En plus, ils sont tous plus jeunes que moi ! (ou comment comprendre que je ne pourrais plus jamais atteindre la célébrité, ma photo ne sera jamais dans Gala ou Closer, j’ai loupé le coche.)

Et que dire de ce moment où, le samedi soir, tu es contente de ne rien avoir sur ton agenda. La petite voix de l’ado que tu étais a beau s’égosiller en t’implorant de sortir, tu veux juste rester chez toi parce que tu as eu « une grosse semaine », et que tu veux pas louper le nouvel épisode de Peaky Blinders (qui est sur Netflix, donc « louper » ça ne fonctionne pas…) De toute façon, si tu sortais, tu mettrais 3 jours à t’en remettre. C’est d’ailleurs pour ça tu cales tes soirées le vendredi maintenant, pour dormir tout le week-end devant une rediff de Stéphane Plaza ! Et puis, si tu sors trop tard, tu vas te lever tard et il n’y aura plus rien chez ton producteur de légumes au marché. Pour mon moi d’avant, celui qui était fringant, le marché c’était réservé à des gens aux cheveux bleus ou violets avec un caddie à trois roues, parce que c’est quand même « plus pratique pour grimper les trottoirs ». Non mais calmons nous, on parle d’un caddie avec 3 poireaux et une salade verte, pas de grimpette en haute montagne non plus.

Cette décrépitude, tu peux en voir des signes partout, dans la vie de tous les jours. Un autre exemple : quand tu te réjouis de travailler de chez toi comme ça, tu vas pouvoir lancer la pyrolyse de ton four pendant les heures creuses. Pardon, mais que se passe-t-il dans mon cerveau ? A quel moment une notion d’heure creuse peut-elle déclencher une notion de joie ? Et puis, franchement, la « pyrolyse ». Je croyais que c’était un mot de passe que ma mère employait. Maintenant je me « réjouis » d’en faire une. Sur le vocabulaire, ça m’a frappée l’autre jour aussi quand, au téléphone l’autre jour, j’ai lancé, le plus naturellement du monde à une copine : « et tu as pu prendre tes jours enfant malade ? » J’ai bien senti, à ce moment-là, mon cerveau se désolidariser de ma pensée. Comment un terme dont j’ignorais jusqu’à il n’y a pas si longtemps la simple existence peut sortir aussi facilement de ma bouche ?

J’ai glissé, je vous dis… Autant que la fois où j’ai rangé tous mes papiers et que j’en étais fière. Attention, quand je dis « ranger », ce n’est pas juste empiler bien droit sur un angle du bureau tous ceux que j’avais pu laisser à d’autres endroits de l’appartement. Non, vraiment ranger, par thème, dans des classeurs. Et là, cette fierté quand j’ai vu mes classeurs alignés, mes papiers triés, mes intercalaires, … intercalés ! J’ai d’abord cru que j’entendais la voix de ma mère, la pro du rangement qui a désespérément essayé de faire de ma sœur et moi des Marie Kondo avant l’heure (pardon Maman pour ces longues après-midis de rangement, mais tu vois ça a fini par prendre) . Mais non, c’était bien une de mes propres voix intérieures (je vous raconterai), qui me félicitait. L’ado en moi en revanche, me regardait d’un air blasé et méprisant. Un ado, quoi.

Alors, oui, justement en parlant d’ado, je suis ravie de ne plus en être une sur plein de sujets. La peau (quoique, ça dépend des jours), les milliers de questions existentielles que tu te poses sur ta vie d’après (alors que globalement, tu peux bien essayer d’y répondre à 16 ans, tu seras forcément à côté de la plaque), les looks (on appelle ça de la curiosité !) … La décrépitude a ça de bon, il faut l’avouer. Et puis, dans 10 ans, quand je relirai ce texte (ou du moins quand j’y repenserai, ne soyons pas présomptueux), je me dirai que mes petits problèmes d’âge n’étaient que mineurs, que tout allait bien finalement. Enfin, j’espère…

Sur ce, je vous laisse, y a école demain !

3 commentaires sur « Chronique d’une décrépitude annoncée. »

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